Voyage

Le tour du monde en 80 mois

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Nous voilà de retour au point de départ en Afrique du Sud.

Le 1er janvier 2010, nous larguions les amarres avec nos quatre enfants sur notre nouveau catamaran de 50 pieds, Banana, un St Francis 50 sorti du chantier 5 mois plus tôt.
Mars 2016, 6 ans plus tard, nous ne sommes plus que trois à bord. Les deux aînés finissent l'université à Montréal, notre fille est entrée au lycée en internat il y a deux ans et le petit dernier a continué avec le CNED à bord jusqu'au bout. Il a maintenant 15 ans et nous allons mettre nos sacs à terre pour trois ans, le temps pour lui de passer son bac.
Comme ce n'est pas l'endroit pour écrire un livre, je vais essayer d'être le plus synthétique possible. L'aventure humaine et le bilan technique pourront intéresser ceux qui se posent des questions sur un départ éventuel. Le plus simple est certainement de vous dire "Oui mais eux ils peuvent" et de continuer à faire ce que vous faites si bien. Bien entendu, il faut aussi immédiatement fermer ce magazine subversif, sinon, vous pourriez prendre un risque : celui de partir ou simplement de commencer à rêver et à faire des projets.
C'est sans doute ce qui nous est arrivé, un jour, nous avons transformé nos rêves en projet et finalement nous avons largué les amarres.
40 000 miles, c'est deux fois le tour de la terre, bien plus que nos estimations initiales. Nous avions anticipé un stock de matériels (filtres, kit de maintenance, joints, pompes, etc.) au départ du Cap pour une année et nous avons renouvelé au fur et à mesure de la consommation. Les petits problèmes sont apparus les premières semaines et ont été résolus avec la première traversée. Une poulie de drisse de spi qui casse, une drisse mal passée dans le mât qui s'use... Rien qui ne remette en cause la fiabilité du bateau. Je dois dire qu'avec du recul nous n'avons pas eu grand-chose à réparer, sauf quand nous avons cassé les choses nous-mêmes. Et même dans ce cas, le chantier a toujours répondu à nos e-mails et réussi à nous faire parvenir la pièce.
En fin de compte, après 6 ans, tout est en ordre, seules les voiles demandent à être changées avant que nous repartions pour un nouveau tour. Elles ont quand même fait plus de 40 000 miles sans se déformer, et elles commencent à se délaminer.

Tour du monde en 80 mois

L'équipage de Banana au départ en Afrique du Sud en 2010.

Et si nous repartions demain pour un nouveau tour ?

Je prendrais un jeu de voiles en Hydranet, plus léger et réparable facilement. Les voiles type membrane carbone Spectra sont solides, ne se déforment pas, mais elles sont plus lourdes et impossibles à recoudre.
Côté gréement, je ne changerais rien, tout est ultra costaud, double haubanage, double étai. Pour les drisses et autres bouts, ils sont de toutes manière changés au fur et à mesure de l'usure.
Pour l'équipement du pont, on ne changerait rien non plus, avec deux gros winchs électriques, tout est simple. Le guindeau est une merveille, rien à dire après 6 ans.
Côté moteurs, les Yanmar sont vraiment la solution pour un tour du monde, robustes, de consommation faible et d'un entretien super facile.
Pour les sail drives, ils fonctionnent très bien, mais la maintenance est plus complexe. Il faut penser à profiter de chaque sortie pour faire une vidange par le bas, et à changer les joints du bas tous les deux ans. De même, il faut impérativement changer les joints du haut toutes les trois vidanges. Les cônes d'embrayage nécessitent d'être remplacés quand ils commencent à glisser après 1600 heures. On peut facilement les faire durer si on n'a pas les pièces, mais comme on le sait, autant prévoir...
Les hélices que j'avais choisies sont des Varifold, et sont vraiment top. On repartirait avec les mêmes.
En conclusion, du côté de la mécanique, il n'y aurait pas de changement si on devait repartir. Après un tour du monde, nos choix ont été validés.

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L'équipage en 2014. Pour le nouveau départ en 2016, ils ne sont plus que trois à bord (plus le chien !).

Côté énergie, nous avons trouvé le juste équilibre. 950 watts de panneaux solaires sur le bimini permettent de compenser la vie au mouillage s’il y a du soleil, sinon, un peu de moteur avec celui qui a la génératrice Yanmar de 3 kW et les batteries sont heureuses. Il y a également une éolienne (silencieuse) de 400 W, mais elle n'a vraiment servi que dans les Caraïbes. En cata, cela ne marche pas vraiment, à cause de la dévente due à la grand-voile, et nous naviguons trop souvent au portant. Au mouillage, généralement bien abrité, cela ne charge pas beaucoup... C'est aussi un système mécanique qui demande des précautions et de l'entretien (roulements tous les 2 ans). Si elle est à bord, gardez-la, mais je n'en équiperai pas mon prochain bateau.
Pour la consommation, nous n'avons pas à nous priver quand nous sommes à 3 ou 4 sur le bateau. Le dessalinisateur Spectra de 60 l/h est impeccable. Nous avons fait une maintenance complète après 2 000 heures et changé la tête de pompe haute pression à 2 500 heures. Quand nous sommes 6-8, il faut faire deux heures de générateur tous les matins, car le dessal doit tourner au moins deux fois plus, sans compter tous les appareils électroniques des visiteurs qu'il faut charger. Pour le reste, tout est en LED, et l'éclairage n'est pas un souci. Si on repart à deux, on ne change rien, sinon, il faudrait un dessalinisateur de 100 l/h pour être à l'aise lorsque nous avons des visiteurs à bord.
Le parc de batteries Optima est de 900 ampères en 12 V plus une batterie de démarrage pour les deux moteurs. Jamais eu aucun souci en 6 ans, on repart avec les mêmes.
Toute l'électronique est en Raymarine, à part un problème de carte d'alimentation du E120 les premiers mois changée sous garantie, rien à signaler, on refait un tour avec. Le téléphone Iridium très fatigué a été changé pour un Iridium Go avec antenne fixe nettement plus efficace pour les fichiers météo, la BLU avec le Pactor 3 fait office de plan B.
En termes de confort, ventilateurs partout, clim réversible quand nous sommes à quai, les deux frigos, le congélo rien à dire, à part un changement de thermostat sur un frigo après 5 ans et une fuite de gaz sur une pièce mal serrée le premier mois. Tout est impeccable. Le four à gaz et les plaques vont être changés maintenant, car il y a de la rouille et la régulation est assez médiocre. Je pense que c'est du consommable à changer tous les 6 ans.
Nous avons refait tous les coussins, et ils ont fière allure, la mousse était fatiguée, tout comme le tissu.
Puisque nous sommes revenus à notre point de départ, et donc au chantier en Afrique du Sud, on en profite pour refaire les vernis, mais je dois dire qu'ils étaient encore très bien après 6 ans autour du monde.
Cette sortie chez St Francis nous permet un checkup/refit complet de Banana. Démâtage pour contrôle complet du gréement, changement des poulies de drisse, etc. Les nouvelles voiles en Hydranet sont installées, chariot Harken de GV révisé, drisses, etc.

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Lors de la construction, des meubles en carton sont installés pour valider les choix.

Ce qui a fait une différence ou qui a fait des envieux

A bord de Banana, nous avions certaines spécificités qui ont plu aux escales, comme l'atelier à bord avec un étau et un outillage assez complet ainsi qu'un stock de pièces non négligeable.
Toutes les parties du bateau sont accessibles sans problèmes. Un vrai plus pour l'entretien et/ou les réparations. Le bateau est bien équilibré électriquement, pas de stress de consommation. Nous n'avons jamais eu de souci de circuits électriques ou de plomberie, sauf le chauffe-eau changé sous garantie après 4 ans.
On dort sur nos deux oreilles au mouillage (ancre Rocna de 40 kg et 100 mètres de chaîne) avec un guideau costaud.
4 réservoirs de diesel de 220 litres, soit 880 litres, qui peuvent être reliés ou non, de quoi ne pas être inquiet et disposer d’une belle autonomie. Enfin, pour le confort à bord, nous avons un lave-linge, une cuisine vraiment spacieuse avec séchoir, et même un piano. De quoi recevoir nos amis comme il faut !
La ventilation naturelle du bateau est particulièrement efficace, et une petite clim permet de vivre à bord quand nous sommes à quai, surtout en saison de pluie quand les capots restent fermés.
Une annexe fond alu avec 25 CV qui déjauge facilement.
Des rangements spécifiques pour les bouteilles de plongée, les cannes à pêche, les skis, wake board, palmes, etc.
Un poste de barre à l'abri sous le bimini et non pas "à l'étage", comme font les constructeurs pour les bateaux de charter…

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Au Vanuatu, les habitants ont beau avoir abandonné depuis longtemps les pratiques cannibales de leurs ancêtres, ils n'en ont pas pour autant perdu leur sens de l'humour…

Mais après ce bilan un peu technique, le plus important reste l'aventure humaine. Nous avons rencontrés des bateaux et des habitants de tous les horizons. Curieusement, les plus belles rencontres ont eu lieu où nous ne l'attendions pas, et les meilleurs souvenirs viennent des endroits où nous avions un a priori négatif. C'est cette partie sociale qui reste la vraie richesse d'une longue navigation, mais il faudrait de nombreuses pages, que nous n'avons pas, pour essayer de partager cette expérience.
Dans trois ans, nous allons préparer un nouveau bateau pour repartir, mais nous savons déjà qu'il ne faudra pas repasser par les mêmes endroits, sous peine de déception, sauf quand on veut y retrouver des amis.
Les amis navigateurs savent déjà que nous reviendrons chez St Francis pour le nouveau catamaran, car nous n'avons toujours pas trouvé un meilleur compromis sécurité/confort/vitesse, et l'aménagement est toujours du sur-mesure. Nous espérons bien que la technologie nous permettra d'utiliser des moteurs électriques à ce moment-là pour apprécier la navigation au moteur silencieuse. L'année de préparation et de construction du bateau fait aussi partie de l'aventure humaine, et c'est avec le même plaisir que nous avons passé du temps sur le chantier pour un refit de Banana avant sa mise sur le marché.

NDLR : Alors que nous préparions notre hors série Grande Croisière, nous avons eu la surprise de voir que Sophie et Robert-Louis était repartis à bord de leur Banana après le gros chantier réalisé en Afrique du Sud. A l'heure où nous mettions sous presse, Banana était en train de naviguer sur l'Atlantique entre les continents africain et américain…

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40 000 milles en 80 mois et des souvenirs plein la tête !

C'est reparti, où les aventures de Banana saison 2…

Comme l’île se trouve pratiquement sur notre route (entre l'Afrique du Sud et le Canada, prochaine escale), nous décidons de faire un stop à Ascension, aussi territoire britannique donc Dinghy (le chien) reste encore à bord. En fait, nous en profitons pour envoyer et recevoir nos courriels, et surtout les devoirs d'Oscar-Louis.
Nous ne pensions pas trouver de changement depuis notre dernier passage en 2010, eh bien si, non seulement il n’y a toujours rien, mais en plus la population est passée de plus de 2 000 à 800 habitants. La plupart des militaires sont partis et l'endroit est encore plus guilleret ! Surtout si on aime le style cailloux avec architecture parpaing. Nous mériterions d'être médaillés pour nous y être arrêtés deux fois…

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Banana saison 2 : c'est reparti pour un tour ! Bon voyage…

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