Antilles

British Virgin Islands : l’alizé plein les voiles

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Le but de ce reportage effectué à la fin de l’hiver dernier était double : vivre une semaine de location et partager cette expérience, mais également faire le point sur la destination British Virgin Islands après le passage du cyclone Irma en septembre 2017. Les marins familiers des Antilles connaissent ces îles paradisiaques. Les terriens, moins... Que vous parliez des îles Vierges britanniques ou des BVI’S, la plupart de vos amis hausseront un sourcil : « C’est où ? » Aux Caraïbes, entre Puerto Rico à l’ouest et Saint-Martin à l’est. Votre voyage en avion fait d’ailleurs forcément escale dans une de de ces deux îles, avant d’emprunter un petit coucou qui s’élève à peine au-dessus des petits cumulus. Déjà toute une aventure… L’aéroport principal de l’archipel des BVI’S est situé à Beef Island, en bordure d’un mouillage tranquille – transformé en cimetière à bateaux depuis le passage du cyclone. A peine 200 mètres de trajet jusqu’à l’embarcadère : allez-y à pied, un taxi nous a demandé 20 $ pour ce trajet ridicule… Un ponton perdu dans le noir de la nuit tropicale, un alizé tiède qui bruisse dans les cocotiers – nous voilà déjà dans l’ambiance des îles ! Toutes les heures, une navette – gratuite, celle-là – vous emmène à Scrub Island, après un stop à Marina Cay. Cet îlot, avec sa fameuse station carburant au toit rouge et son bar, le Robb White House, fait figure de best of ici. La base Dream Yachts Charter a donc quitté, après le passage d’Irma, l’île principale de Tortola pour prendre ses quartiers au sein d’un complexe hôtel/marina.

Une coque chacun : le grand luxe !

Nous repérons rapidement notre Bali 4.0, pas fâchés d’y dormir… Nous ne sommes que deux à bord – mon frère Paul et moi. Une coque chacun ! Au réveil, nous découvrons des bâtiments imposants, mais un cadre finalement agréable et pratique – des commerces, des piscines, une petite plage, il y a pire pour attendre le briefing skipper. La prise en main d’un catamaran de location se fait en trois étapes : on règle d’abord au bureau DYC les formalités diverses, on suit les conseils météo et navigation, et enfin on passe en revue le fonctionnement de tous les équipements du cata. Moteurs, winches, annexe, guindeau, circuit électrique, réservoirs, dessalinisateur : rien n’échappe à l’imposante check list, ce qui permet de se débrouiller ensuite. Un bon truc ? Prenez en photo – ou mini vidéo – les éléments clés comme l’emplacement du fusible du guindeau, ça peut servir ! Nous avons fait le choix de commander d’avance un avitaillement complet. Les prix demandés sont élevés – environ 400 $ pour deux personnes –, mais au final moins chers que ceux pratiqués par la petite supérette du complexe. Et faire un plein de courses depuis un bateau n’a rien d’évident aux BVI’s – à moins d’emprunter un taxi. Notre Bali, enchâssé tout au fond du port, promet une manœuvre compliquée ; très gentiment, un technicien de DYC se propose de prendre les commandes. Il saute dans son dinghy dès les jetées franchies. « Enjoy ! » Alors, on va où ?

50 îles à découvrir

Sur la carte, une cinquantaine d’îles, dont une grande partie sont désertes. Toutes ne présentent pas des mouillages sous le vent, mais les possibilités restent infinies. On commence par Guana Island et sa plage de White Bay, toute proche et parfaite pour un premier bain dans l’eau chaude et turquoise. Sable blanc immaculé, eau translucide et cocotiers, nous sommes déjà au paradis, à moins de 3 milles de la base ! Pas grand-chose de plus à faire : l’île est privée. Cette première plongée est délicieuse, mais un peu gâchée tout de même par ce qu’on découvre sous la surface : rien à redire sur les fonds, mais plutôt sur nos coques et les appendices, colonisés par les crustacés tropicaux… Repas, vaisselle, farniente : la vie à bord s’organise. Le concept open du Bali est parfait sous les tropiques. On peut rester à l’ombre et au frais pendant les heures chaudes et profiter d’une vaste surface dégagée sur le pont avant quand le soleil ne cogne pas trop fort.

Nous hissons la grand-voile, prenons un ris, déroulons le génois, parés pour une bonne partie de louvoyage vers Virgin Gorda et son lagon mythique – c’est là que Richard Branson possède une villa magnifique. L’alizé est établi à 20 nœuds, pointes à 22, la mer un peu clapoteuse – rien de méchant. Mais notre vitesse ne dépasse pas 4 nœuds, sans parler du cap. Notre Bali 4.0 n’y est pour rien : j’ai testé ce catamaran lors de son lancement, et les vitesses relevées alors étaient bien plus flatteuses ! Bref, nous appuierons au moteur la plupart de nos navigations – 180 $ à la pompe au final, d’où l’intérêt de conserver des carènes propres. L’arrivée dans le lagon, où j’ai navigué deux ans plus tôt, est un choc : il n’y a plus rien. Toutes les marinas, à l’exception de celle de Leverick, sont détruites ou en chantier. Le site merveilleux de Bitter End est rasé. Une grue s’affaire sur l’îlot de Saba Rock. L’immense plan d’eau qui accueillait des centaines de bateaux tous les jours est pratiquement désert. A l’ouest, l’épave d’un cargo rappelle la violence d’Irma. On passe ici une nuit d’un calme absolu, mouillés en bordure de la plage de Prickly Pear. Virgin Gorda propose également deux autres spots. Le premier, The Baths, est un incontournable : un extraordinaire enchevêtrement de rochers dans une végétation luxuriante, des plages miniatures et une eau limpide. Préférez y aller en fin de journée pour une lumière idéale. Une visite à terre du site est possible. A moins de deux milles, Spanish Town, plus grande ville de Virgin Gorda, offre un bon mouillage pour la nuit – corps-morts au nord du port et possibilité de se glisser entre la barrière de corail et la plage. A terre, quelques restaurants sympas. Notre préféré ? Le Bamboo ! Le sud de l’archipel présente un chapelet de cinq îles, les Sister Islands. De l’est à l’ouest : Ginger, Cooper, Salt, Peter et Norman. Toutes sont très sauvages et offrent d’excellentes possibilités de mouillage sous le vent de l’alizé. Cooper et Peter proposent des corps-morts et des infrastructures à terre, tandis que Salt Island est restée figée par le cyclone. Depuis Norman, un long bord au portant tribord amures nous fait longer la frontière américaine – évidemment invisible sur l’eau ; on contourne l’extrémité ouest de Tortola pour gagner Jost Van Dycke – appelée ici Jost ou JVD – et ses plages magnifiques.

Anegada, son bush et son corail…

Retour sur la carte : à 25 milles à l’est-nord-est, l’île d’Anegeda nous tente… on longe la côte nord de Tortola pour limiter le clapot, puis notre Bali pousse encore à l’est, protégé par Virgin Gorda. Plus de route, mais nous sommes alors bien positionnés pour une traversée de 12 milles, vent de travers. La mer est un peu plus forte ; néanmoins, la houle est rapidement réduite par les hauts fonds d’Anegada, lesquels s’étendent loin vers le sud-est. Notre allure favorable et le vent fort nous permettent enfin de naviguer à la voile, sans l’appui des moteurs. L’approche de l’île est déroutante : on ne la voit pas ! Et puis quelques points noirs apparaissent – ce sont les plus hauts arbres. Anegeda est en effet, contrairement à toutes les autres îles des BVI’S, toute plate, puisque son point culminant est de 8 mètres seulement. Progressivement, le clapot disparaît et l’eau devient plus claire, pour devenir turquoise. On voit même parfaitement les fonds : une navigation de rêve… L’île est grande – 19 km de long sur 5 km de large – et bordée de plages sublimes. Mais le corail limite son accès à Setting Point. Le mouillage est vaste, mais logiquement prisé. Le soir, l’ambiance est particulièrement festive au Potter’s Bar, où les équipages marquent leur passage sur les poutres et les murs de l’établissement. A moins d’un mille à l’ouest, un autre mouillage est possible. Pratiquement désert, celui-là, mais parfois, le ressac complique le débarquement en annexe. A terre, des palétuviers, le bush, des marais salants où les flamants roses ont été réintroduits, et seulement 200 habitants… On reste encore une nuit ?

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